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Le lendemain… Au Los Angeles Highschool et pendant la pause de la matinée, Joakim se presse vers son ami Hajer Riahi pour l’interpeller :
— Hey, tu ne sors pas ?
En effet, les deux interlocuteurs ont pour habitude de prendre l’air pendant les intercours, mais, malgré cette routine, l’un des deux acolytes semble rester assis devant un cahier ouvert, aujourd’hui. Alors que d’ordinaire, il n’en redemande jamais après les cours !
— Flemme, répond le brun à la barbe taillée avec soin, en tournant à peine la tête dans la direction du châtain clair aux pupilles vertes ; des couleurs héritées de son paternel.
— Que lis-tu ?
Joakim pose cette question en jetant un coup d’œil furtif sur le carnet de son ami.
— Je suis bientôt à la fin de mon roman, informe fièrement Hajer, avec cependant une anxiété palpable au creux de la voix.
— Tu n’as pas l’air convaincu.
— Est-ce que tu voudrais être mon relecteur ? Demande timidement Hajer. Je ne l’ai encore fait lire à personne et j’aimerais un avis solide, sincère, de quelqu’un en qui j’ai pleinement confiance…
Oui. Beaucoup pensent la même chose de Joakim Bauer, car dès qu’un souci s’annonce à l’horizon, une angoisse, une crainte quelconque, un besoin d’aide, peu importe le domaine, tous ont l’habitude de l’appeler à la rescousse. Voilà pourquoi Noah l’a souvent affublé du surnom « Superman ».
— Si tu veux, mais après on sort.
La critique tombe très vite. Joakim n’hésite pas une seule seconde à lui révéler, huit minutes à peine plus tard, que son héroïne est une Mary Sue, que les événements de son roman restent lisses et que son livre ne possédant ni trame ni squelette, il a eu l’impression de suivre la vie fade d’une poignée de débiles. Choqué et furieux, Hajer réagit en arrachant son cahier des mains de son ami. Il est outré et lui en veut de le rabaisser ainsi ! De n’avoir feuilleté ses pages que pendant quelques misérables minutes, perché sur une table de façon désinvolte, pour le descendre en flèches ! Pour qui se prend-il ? Lui qui n’a même pas essayé de lire correctement son histoire, de se concentrer, de s’investir suffisamment pour pouvoir se permettre de donner un avis respectueux ! En si peu de temps, il ne pouvait saisir l’essence de son scénario !
— J’en ai lu assez pour pouvoir juger.
En réalité, Joakim a lu la totalité de l’ouvrage de son camarade.
— C’est bon, va chier. En huit minutes, tu n’as surement pu lire que le premier chapitre ! Allez, on sort, ça vaut mieux, j’ai envie de fumer une clope.
— Si tu veux, acquiesce Joakim en suivant son ami à l’extérieur de la classe.